dimanche 17 mars 2013

INTERVIEW FOOT : STEEVE ELANA PASSÉ AU CRIBLE




STEEVE ELANA PASSE AU CRIBLE



 [Propos recueillis le 30 novembre 2012]

Arrivant tout droit de Brest dont il était devenu le gardien indétrônable, Steeve Elana a signé au LOSC, au dernier mercato estival, en tant que doublure de Mickaël Landreau pour une durée de 3 ans. A 32 ans, celui que l’on surnomme « le Chat » de par son jeu aérien et félin dans les cages aborde un tournant décisif dans sa carrière, qui a pu parfois être incompris, et a souvent beaucoup fait parler. A l’heure où le portier vient de jouer son 4e match sous les couleurs du Lille OSC, il me semblait bon que l’on donne à Steeve Elana un temps de parole, à présent qu’on lui accorde aussi du temps de jeu.

Retour sur les propos de Steeve Elana qui ont été recueillis fin novembre 2012, une semaine seulement avant qu'il n'ait à assurer ses nouvelles fonctions de gardien titulaire du LOSC, suite au départ impromptu de Mickaël Landreau :


LJ : Après sept ans de bons et loyaux services au SB29 où tu étais un titulaire indiscutable, ainsi qu’une dernière saison personnelle incroyable qui est sans doute la meilleure de ta carrière à ce jour, tu signes au LOSC pour un rôle de doublure. C’est un choix qui a été parfois incompris, voire décrié par certains. J’aimerais que l’on revienne sur cette décision qui marque un tournant dans ta carrière.
SE : A vrai dire, ce choix a seulement été un grand étonnement pour les gens qui ne me connaissent pas personnellement, qui ne connaissent de moi que le gardien de but ou l’homme que je suis depuis la montée du SB29 en L1, c’est-à-dire depuis deux ans… Il y a eu beaucoup de faits antérieurs à cela, beaucoup de choses qui expliquent ce choix. Que les gens ne le comprennent pas est une chose, il n’en reste pas moins que ce choix-là m’appartenait. Les personnes qui me connaissent vraiment, depuis longtemps, qui m’aident à prendre ce genre de décisions au sein de ma vie, n’ont émis aucune réserve lorsque je leur ai évoqué un éventuel départ de Brest, et qui de plus serait sans doute afin de tenir un rôle qui n’était pas le mien jusqu’alors… Je ne m’étalerai pas sur les raisons de ma décision, parce qu’elles me regardent. Mais, tu sais, cela fait longtemps que je vois que le train passe pour certains, qu’ils se retrouvent dans de très bons clubs… A force, on en vient à se dire : « Pourquoi pas moi ? » si un jour on en a l’opportunité, ou ne serait-ce que parce qu’on  suscite l’intérêt d’un grand club français !

A 32 ans, n’est-ce tout de même pas un pari risqué ?
Pas du tout, parce que je sais pourquoi je le fais ! A 32 ans, mon objectif est de durer le plus longtemps possible dans ce métier et j’estime qu’à Brest, d’un point de vue infrastructures,  ça n’aurait pas été possible. Alors oui, effectivement, si j’étais resté à Brest, j’aurais certainement été titulaire et à l’heure actuelle, je jouerais. Mais physiquement, là-bas, c’était une lutte ; pour mon genou, pour avoir des soins, une mise en forme adéquate par rapport à ce que je réalisais au Stade Brestois. A 32 ans, j’avais envie de jouir de tous ces avantages qu’un grand club peut offrir au niveau de la préparation physique, d’avoir un centre d’entraînement, un vrai ! Aujourd’hui, je me sens beaucoup mieux physiquement, même si je joue beaucoup moins. Mes pépins physiques n’existent plus, je travaille dans des conditions qui sont top et j’optimise encore mes capacités physiques, avec le travail que je peux effectuer en dehors de mes séances avec un staff spécialement mis en place pour cela. Je progresse énormément sur certains points grâce à cela, j’ai appris énormément sur moi en arrivant ici. Avec toute la bonne volonté du monde, le Stade Brestois n’était pas capable de m’offrir tout cela. Si le SB29 avait eu un centre d’entraînement digne de ce nom, une organisation un petit peu moins « bancale », qui sait, je serais peut-être resté. 

A l’époque où tu jouais à Caen (2002-2005), tu avais plutôt mal vécu le fait de perdre ta place de titulaire après ton retour de blessure (NDLR : au profit de Vincent Planté) … A présent, tu fais le choix délibéré d’être gardien remplaçant. Quelle est la différence entre cette époque et aujourd’hui ?
Il y a une grosse différence. A Caen, ça n’est pas spécialement le fait de ne plus jouer qui m’avait le plus déçu alors, c’est surtout le fait que les dirigeants de l’époque n’avaient pas été honnêtes avec moi. Je ne veux pas rentrer dans les détails car c’est un club qui m’a aussi tout de même apporté certaines choses. Ca n’est pas le côté sportif que j’ai pu remettre ou que je remets encore en cause aujourd’hui, c’est le côté humain. On n’a pas été correct avec moi. Je pense, avec mes qualités et mes défauts, ne jamais avoir causé de problème dans quelque club que ce soit, même lorsque les décisions prises n’étaient pas en ma faveur, et j’ai toujours estimé au moins mériter que l’on soit correct avec moi sur le plan humain. Sur le plan sportif, c’est autre chose : ce sont des choix d’entraîneur que je me dois d’accepter, quels qu’ils soient, dès lors que je paraphe un contrat dans un club.



La venue d’un portier de ta « trempe » en tant que doublure du LOSC a fait couler beaucoup d’encre au sujet de la rivalité qui existerait et des tensions qui pourraient naître entre Landreau et toi. Les rumeurs et les supputations, soit, mais en vérité, qu’en est-il ? L’ambiance et l’entente restent-elles tout de même bonnes ?
Dès lors que des contacts ont été noués avec le LOSC me concernant, Mickaël Landreau a été au courant. C’est une personne que je côtoie de par les matchs depuis près de neuf ans et avec qui je m’entends bien, il me semblait donc évident que je m’entretienne avec lui de ma venue dans son club. Nos relations sont très bonnes, c’est une personne qui m’a accueilli à bras ouverts au LOSC et qui m’aide lorsque j’en ai besoin concernant l’organisation du club. Sur ce qui est du terrain, honnêtement, on n’en parle pas, on a l’intelligence de ne pas le faire. J’ai énormément de respect pour ce qu’il a pu faire au LOSC : Arriver dans un club et remporter le championnat en même temps que la Coupe de France, y apporter son expérience et mettre en place certaines choses… On est transparents dans nos relations au quotidien et dans le travail, il n’y aucun soucis. On sait également tous deux qu’on est soumis aux choix de l’entraîneur, qu’on en est tributaires. J’ai été recruté pour un rôle bien précis, mais je suis quelqu’un de compétiteur, qui désire travailler, qui prend du plaisir à jouer et tenter d’être efficace. Je prends ce qu’on me donne et essaie d’être le meilleur possible lorsqu’on fait appel à moi.

En 2010, tu gagnes le trophée UNFP du meilleur gardien de L2, la même année de la montée du Stade Brestois et de ton record d’invincibilité (NDLR : Steeve a gardé ses cages inviolées pendant plus de 8 matchs, soit 832 minutes, et c’est d’ailleurs Moussa Sow, à Lille, qui mettra un terme à ce 5e meilleur record de L1, le titre étant détenu par Gaëtan Huard aux GdB). Depuis, en L1 et malgré de nombreux exploits personnels et une grande régularité de ta part, les médias ont peiné à parler de toi comme tu l’aurais mérité. Tes pairs t’ont même nommé l’année dernière comme le gardien le plus sous-coté de la L1 dans un sondage réalisé par l’Equipe ! Comment expliques-tu ce manque d’exposition médiatique dont tu pâtis ?
Concernant le trophée UNFP, cela a été une grande surprise et une grande joie pour moi de savoir, premièrement que j’avais été nominé, et qu’ensuite j’en étais lauréat. Cette récompense-là est attribuée à un joueur par ses pairs et à un moment donné, lorsqu’on ne peut pas entrer par la porte, on le fait par la fenêtre, et c’est un petit peu ce que j’ai fait en remportant ce trophée. J’ai été d’autant plus heureux pour mes proches, qui ont galéré avec moi et qui ont été témoins de ce que j’ai pu vivre de par mon métier, car c’est une récompense qu’ils ont eux aussi pleinement vécue et grâce à laquelle j’ai senti un réel soulagement chez mes parents, surtout chez ma mère qui est celle qui a tout vécu concernant mon parcours dans le football… Pour ce qui est du fait de ce « manque » d’exposition, honnêtement, je n’ai pas d’explication, si ce n’est que certains ont leurs têtes, leurs clubs. Personnellement, j’essaie de ne pas me focaliser là-dessus et je me dis que la récompense vient, quoiqu’il arrive ; parce que j’ai toujours respecté mon métier et fait en sorte de durer le plus possible, d’être à la recherche de la perfection dans ce que je pouvais faire… Donc ce fait-là ne m’a jamais empêché de travailler et peut-être même que ça m’a d’autant plus motivé à le faire. En soit, c’est comme cela, et je fais avec.

On te compare souvent à Bernard Lama pour qui tu as une profonde admiration, à juste titre d’ailleurs car vous avez le même profil aérien. On parle moins souvent de Joseph-Antoine Bell avec qui tu partages également ce côté « félin ». Ce dernier a-t-il été un exemple pour toi ?
Absolument. Mon père était supporter des Girondins de Bordeaux et forcément à l’époque on s’en coltinait tous les matchs à la télé ma mère et moi, qu’on en ait envie ou pas ! (rires) Joseph-Antoine Bell a donc été le premier gardien que j’ai voulu reproduire lorsque je plongeais, enfant, dans mon canapé. Il a été un précurseur, et pour moi un détonateur, du moins sur mon sofa. Parce qu’il était un des seuls gardiens blacks et qu’il fallait bien que je m’identifie à quelqu’un.

Comment en es-tu d’ailleurs arrivé au poste de gardien ?
Lorsque j’étais enfant, un de mes meilleurs amis était à Clairefontaine, et quand on n’avait pas école, on se levait tôt le matin pour s’entraîner ; il s’amusait à frapper pendant que j’officiais dans les cages et, au final, je suis un peu devenu son gardien attitré. Au fur et à mesure, j’ai pris goût à jouer à ce poste, parce qu’il faut savoir que j’ai débuté joueur de champ puisque que mon père voulait faire de moi le nouveau Marius Trésor ! (rires) J’ai d'ailleurs mis longtemps à lui avouer que je jouais au poste de gardien, ma mère m’achetait mes gants en cachette ! Je ne l’ai fait que le jour où je lui ai rapporté à la maison le trophée de meilleur gardien. Dans mon quartier, il y avait des matchs très animés suivis par le voisinage depuis leur balcon, l’été. Quand on est jeune, on a envie de participer à ces matchs-là avec les "grands", et quand on est petit et pas spécialement surdoué, la seule place qu’il reste est souvent celle du gardien. J’ai commencé à participer à ces matchs avec les plus grands et y ai pris du plaisir, car ils m’y encourageaient. C’est à ce moment là que j’ai réellement commencé à aimer exercer à ce poste-là.


Tu es né à Aubervilliers et a grandi en région parisienne, évoluant au FC Solitaires (club du 19e arr. de Paris). Comment t’es-tu retrouvé à habiter et jouer à Marseille ?
Arrivé à l’âge de mes 16 ans, j’ai fait une connerie que ma mère n’a pas bien vécue, et ce jour-là elle s’est dit qu’elle ne viendrait plus jamais me chercher à un commissariat. Elle a donc tout mis en œuvre afin que je quitte mon quartier et me donner une chance d’avoir un sport-études pour faire ce qui semblait être ma voie, qui était le football. Le sport-études qu’elle m’a trouvé, qui collait à l’environnement scolaire qui me convenait, se trouvait à Marseille. Je suis donc parti y faire des essais et je m’en suis très bien sorti. Je me retrouve donc à déménager à Marseille à l’âge de mes 16-17 ans, et ça a été un changement radical dans ma vie, de quitter la banlieue parisienne pour la cité phocéenne. 
Ça a un peu été le parcours du combattant une fois arrivé là-bas, parce qu’il semblerait que ni ma candidature au poste de gardien au Burel FC, ni mon inscription à l’internat du Sport-Études n’aient été prises au sérieux, peut-être du fait que nous appelions depuis Paris et qu’on a pensé à un canular… Le poste de gardien du Burel était donc déjà pourvu à mon arrivée, et je me retrouvais qui plus est sans place à l’internat. Ma mère a donc dû me suivre à Marseille, accompagnée de mon petit frère et de ma petite sœur, afin que nous habitions ensemble là-bas. Et le Burel FC a passé une sorte d’accord moral avec moi, en me prêtant à l’US Endoumes en moins de 17 DH pour une saison, à la fin de laquelle il était prévu que je me retrouve au Burel avec les moins de 17 nationaux, en espérant qu’ils se maintiennent d'ici là.
Au sortir de cette saison, tout se passe très bien et l’US Endoumes veut me garder, moyennant finances. Mais du fait que j’avais donné ma parole au Burel FC, mes parents et moi avons décidé de tenir parole et de signer au Burel. J’y joue en 17 Nationaux et c’est un vrai plaisir pour moi d’évoluer et de participer à des matchs contre des clubs tels que l’AS Monaco, l’OM, l’AS Cannes, l’OGC Nice, et de rencontrer les centres de formation faits de gamins de mon âge qui eux vivent mon rêve au quotidien. On se maintient en fin de saison, mais je passe alors en moins de 20 ans et je me retrouve donc sans club, vu qu’il y avait déjà quelqu’un à mon poste dans cette catégorie-là… à m’entraîner par-ci par-là et à ne plus avoir d’ambitions ni de challenges au sein d’un club… Un court instant, l’idée d’arrêter le foot me passe par la tête, à ce moment-là.

Justement, qu’aurais-tu fait si tu avais arrêté le foot à cette période-là ?
Deux solutions se présentaient alors à moi : C’était soit me trouver un petit boulot à Marseille, par la débrouille ou en faisant jouer le peu de relations que j’avais pu avoir là-bas, soit rentrer sur Paris et prendre la succession de mon père qui était propriétaire de trois auto-écoles là-bas. Voilà quels étaient mes débouchés à ce moment-là. Là encore, c’est ma mère qui intervient en me disant qu’il est hors de question que j’arrête le football. Le fait qu’elle me dise ça m’a fait me remémorer tout ce qu’elle avait fait et sacrifié pour moi afin que je puisse vivre ma passion et me donner une chance de réussir. Cela m’a fait réfléchir et me dire qu’elle méritait bien que j’essaie une dernière fois de m’accrocher à quelque chose. Et ce "quelque chose" fut Jean-Pierre Siacci, qui était alors entraîneur des moins de 20 ans à l’Olympique de Marseille et qui, après avoir été harcelé par ma mère, accepta de me prendre à l’entraînement pour voir ce que je valais. Et qui décida de me garder et de me faire jouer afin de me donner une chance de réussir, car j’étais encore jeune. 
En fin de saison, à la suite d’un tournoi à Croix, dans le Nord justement, plusieurs clubs professionnels - deux à l’étranger et un en France -, se sont intéressés à moi et ont proposé de me faire signer un contrat. En apprenant cela, Georges Prost, le directeur du centre de formation de l’OM, prit alors la décision de me garder et de me faire signer un premier contrat. A ce moment précis, je ne comprends plus trop ce qu'il m’arrive : Je passe de potentiel joueur perdu en catégorie moins de 20 ans à un joueur qui signe un contrat ! Je débute alors ma saison avec la Réserve de l’OM et là, c’est vraiment tout autre chose : J’accède à la Commanderie, je porte le maillot de l’Olympique marseillais et pour la première fois de ma vie, j’ai à faire à des kinés, à des médecins, et je me retrouve salarié ; je peux enfin pouvoir mettre la main à la pâte et aider mes parents, subvenir à mes propres besoins… Pour moi, c’est le début d’une autre vie.
C’est à ce moment-là que je fais la rencontre de Marc Levy (NDLR : entraîneur des gardiens), qui est vraiment celui qui m’a fait comprendre ce qu’était un footballeur professionnel. Il n’a pas hésité à prendre de son temps, à me faire m’entraîner deux fois par jour pour arriver à me faire assimiler ce qu’était le poste de gardien et à me le faire redécouvrir : Tout ce que je croyais savoir jusqu’alors a été chamboulé.
A cette époque-là, Eric Di Meco et Marcel Dib, qui étaient alors en charge de la gestion du groupe pro, m’ont fait signer un contrat stagiaire après que j’aie effectué deux-trois séances avec les gardiens pro (Stéphane Trévisan, Stéphane Porato et Cédric Carrasso), et c’est alors mon premier contrat reconnu par la Fédération. Je m’avance un peu plus vers ce que j’attendais du métier, et c’est un réel bonheur.



Il y a de cela quelques années, tu avais déclaré avoir passé un contrat moral avec toi-même en te donnant jusqu’à tes 37 ans pour poursuivre ta carrière de portier. A ce jour, l’échéance a-t-elle été repoussée ? Prendras-tu justement exemple sur Bell et atteindre tes 40 ans en étant toujours en activité?
J’espère repousser mes limites tant que je me sentirai bien. Je ne sais pas de quoi demain sera fait, je ne sais pas exactement ce qu’il va me tomber dessus mais, une chose est sûre, je les repousserai tant que j’en aurai l’envie et que mon corps me le permettra ! La barre des 37 ans, c’était pour me donner un objectif ; maintenant, si je peux aller plus loin, je le ferai. Ma carrière est faite de la sorte, j’ai tout connu tardivement ; si je peux aussi connaître une fin de carrière sur le tard, je ne m’en priverais pas !

En bon sportif que tu es, tu es un compétiteur, un challengeur. Lille est déjà un grand défi dans ta carrière, te vois-tu en relever un autre avant qu’elle ne prenne fin ? Je sais que l’étranger t’attirait, fut un temps…
L’étranger m’a énormément attiré. Aujourd’hui, honnêtement, je ne peux pas te dire que je le sois autant qu’avant. Le gardien français, de par sa réputation, s’exporte mal et je ne suis pas homme à tenter l’impossible. Cela aurait pu être un changement intéressant pour moi, il y a quelques années. A l’heure actuelle, je n’en vois pas trop l’intérêt, à moins qu’en France on ne veuille plus de moi ou qu’un entraîneur ou qu’un club à l’étranger soit séduit par mon jeu et veuille me signer… Je ne suis plus autant focalisé sur ça et je serais capable de terminer ma carrière au LOSC, sans aucun problème.

D’ailleurs, lorsque ta carrière prendra fin, quelle reconversion imagines-tu pour ta personne ? Vas-tu rester dans le football ou te reconvertir dans un tout autre milieu ?
J’espère ne pas avoir à vivre du foot car honnêtement, je ne vois pas trop où y serait ma place, dans le football professionnel du moins. Je me verrais plus dans des projets sociaux, et dans d’autres où mon nom pourrait me permettre de m’investir dans le football aux Antilles afin de promouvoir cette jeunesse martiniquaise qui a des possibilités, mais pas forcément les outils nécessaires à son essor. C’est réellement quelque chose que j’ai envie de réaliser et dans laquelle je veux véritablement m’impliquer, à court et moyen terme. 

Tu as joué le tout premier match de ta carrière en Ligue des Champions sous les couleurs du LOSC, au Dynamo Stadium face au Bate Borisov le 20 novembre dernier. C’est un peu le rêve de tout footballeur… Que ressent-on ?
J’ai eu des flashs durant l’hymne. Toutes mes émotions sont survenues pendant qu’il retentissait. Les images défilaient : J’ai revu mes galères, comme ma blessure à Caen, j’ai vu le visage de ma famille et de mes proches que j’imaginais heureux de me voir titularisé en Ligue des Champions… ainsi que ceux de mes coéquipiers à Brest avec qui je faisais parfois des soirées « Ligue des Champions » et où chacun d’entre nous rêvait alors d’y participer ! Ca a été d’une intensité rare pour moi que de vivre cela. Même si je n’ai pas affronté le Barça ! Un match de la Ligue des Champions reste un match de la Ligue des Champions, et jouer contre le champion biélorusse, cela me convenait parfaitement.


Venons-en à présent à tes préférences football ! Petit, quelle était l’équipe qui te faisait rêver ? Dans laquelle tu aurais adoré jouer ?
Quand j’étais petit, c’était le PSG de Lama et Weah qui me faisait vibrer. Concernant mon retournement de veste (NDLR : Steeve soutient l’OM), il s’est produit lorsque je n’ai pas supporté le comportement de certains supporters après que George Weah ait quitté le PSG. C’est ce qui m’a définitivement fait me détacher du Paris Saint-Germain, et je suis resté un bon moment sans supporter d’autre club. C’est en arrivant à Marseille et en découvrant, fasciné, l’impact que le club avait sur la ville et les gens, cette ferveur qui existait, combien la ville reposait sur l’OM que je me suis mis à les supporter.

Quel est le meilleur joueur de tous les temps, selon toi ?
George Weah. C’est le joueur qui m’a donné le plus d’émotions, de sensations fortes. C’était le joueur dont j’étais vraiment fan absolu, il était mon idole ! Je l’ai idolâtré pendant des années, jusqu’à la fin de sa carrière. Par la suite, j’ai eu la chance d’évoluer au quotidien avec lui au sein de l’OM, et c’est quelque chose que je n’oublierai jamais, ça a été un pur bonheur pour moi. Je n’ai même pas osé lui demander un maillot à cette époque-là, et je m’en veux encore d’ailleurs…

L’attaquant le plus retors que tu aies affronté en duel au sein de ta carrière ?
On va dire Pauleta, c’était la période durant laquelle je jouais à Caen, en 2004.

Ton meilleur souvenir sur un terrain, lequel est-ce ?
Mes meilleurs souvenirs sur le terrain sont tous le résultat d’une montée et des matchs liés à une montée. Et j’ai eu la chance d’en vivre pas mal ! La plus belle restera pour moi la première, parce que je ne m’y attendais pas et parce qu’elle s’est jouée au dernier match. C’était la montée en Ligue 2 avec l’AS Valence en 2002, et j’ai pris énormément de plaisir à jouer cette rencontre et à contrecarrer les attaques cannoises, à l’époque. C’était ma première grande aventure en tant que professionnel, et qu’elle se termine de la sorte fut vraiment une apothéose.

Et Le pire ?                                                                  
Ma blessure à Caen. Elle est arrivée à un moment où avec Caen nous montions en Ligue 1 et où j’avais la chance que les dirigeants me fassent confiance pour me faire découvrir la L1 avec mes coéquipiers. Et c’est exactement au moment où j’ai commencé à réellement prendre du plaisir à évoluer à ce niveau-là que ma blessure est survenue… C’est véritablement le gros point noir de ma carrière. Je pense avoir loupé quelque chose à ce moment-là. S’il avait dû se passer quelque chose de grand pour moi dans ma carrière, ça aurait pu être cette saison-là, car j’étais suivi de très près par certains clubs… Ça a été très difficile à vivre.

Ton Top 3 des portiers ayant évolué ou évoluant en L1 ?
Bernard Lama – Stéphane Trévisan – Steve Mandanda

Et ton Top 3 des gardiens à l’international, en activité ou non ?
Iker Casillas – Joseph-Antoine Bell – Gianluigi Buffon


 LE VESTIAIRE DU LOSC PAR STEEVE ELANA

-          Le plus accueillant : Aurélien Fournier (coordinateur sportif du LOSC)
-          Le plus superstitieux : Tulio De Melo, il met toujours le même caleçon quand il joue ! (rires)
-          Le plus expérimenté : Mickaël Landreau
-          Le plus taquin : Rio Mavuba
-          Le plus ronchon : Ronny Rodelin
-          Le plus coquet : David Rozenhal
-          Le plus susceptible : Florent Balmont, il est très gentil mais il ne faut pas le faire chier ! (rires)
-          Le plus fair-play : Laurent Bonnart


INTERVIEW PARUE DANS BUT! LILLE N°7 (DÉCEMBRE 2012) 

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vendredi 25 janvier 2013

INTERVIEW FOOT : AURELIEN CHEDJOU PASSÉ AU CRIBLE



AURÉLIEN CHEDJOU PASSE AU CRIBLE


Chaque mois pour But ! Lille, notre journaliste passe au crible un joueur du LOSC. Pour cette deuxième édition,  c’est au tour d’Aurélien Chedjou de répondre à ses questions…

Aurélien Chedjou : 27 ans, international camerounais né à Douala et évoluant au poste de défenseur au Lille OSC. Un gabarit imposant (1m84 pour 86 kgs), un rire communicatif et tonitruant ; et un parcours somme toute atypique pour un footballeur aujourd’hui passé professionnel qui attisait ma curiosité et sur lequel je souhaitais revenir et m’entretenir, avec lui. Et c’est avec une grande spontanéité et un naturel déconcertant qu’Aurélien a répondu à chacune de mes interrogations. Rencontre avec ce cadre qui porte fièrement les couleurs du LOSC depuis 5 ans, à la veille d’un Derby du Nord qui aura tenu toutes ses promesses.

LJ : Ça patauge un peu en ce moment au LOSC ; et si on ajoute à ça l’élimination du Cameroun à la CAN et le climat de clivages et de polémiques qui tourne autour des Lions Indomptables, comment se porte ton moral ? Quel est ton état d’esprit du moment ?
AC : C'est vrai que tout n'est pas tout rose en ce moment au club… Mais dans ces moments difficiles,  il n'y a qu'une seule solution : se réfugier dans le travail. La qualité, on l'a. Il nous faut juste un peu de réussite et le reste suivra. Le moral ? Ca va, un peu… Pourquoi seulement « qu’un peu »? Parce que ce n'est pas évident de se lever chaque matin quand tout ne marche pas comme on veut.

Ton parcours dans le football est assez atypique.  Tu as enchaîné les clubs en amateur, du Cameroun (Kadji Sports Academy, NDLR)  jusqu’en en France (Pau FC, AJ Auxerre et FC Rouen, NDLR), en passant par l’Espagne (Villareal CF, NDLR), avant de poser tes bagages à long terme au LOSC, club qui t’a offert la chance de passer professionnel et où ta venue, d’ailleurs, n’a tenu qu’à un SMS de ta part à l’égard de Pascal Plancque (alors entraîneur de l’équipe réserve du LOSC, NDLR). J’aimerais que tu reviennes sur cette histoire atypique et belle, et que tu portes un regard sur ton parcours : Quel(s) sentiment(s) éprouves-tu lorsque tu vois le chemin parcouru depuis la Kadji Sports Academy ?
Quand je regarde mon parcours, jusqu'à présent, je me dis tout simplement que j'ai énormément de chance… Dieu a voulu que j'arrive dans le monde professionnel du football un peu plus tard que les autres, peut-être, mais cela fait partie des épreuves de la vie ! Je dois aussi t’avouer que j'ai souvent douté… Beaucoup, même. Et sans ce SMS envoyé au coach Plancque, - avec qui je suis toujours en contact, d’ailleurs - tu ne m'aurais sûrement pas interviewé. Pour te résumer l’histoire, je jouais alors à Rouen en CFA, ça n’allait pas fort, et j’ai envoyé un message à Pascal Plancque (qui avait déjà approché l’agent d’Aurélien une première fois lorsqu’il jouait à Auxerre, NDLR) pour, soi-disant, prendre de ses nouvelles… Mais en réalité, Je voulais « tâter le terrain », et savoir s'il pensait toujours à moi. Et tout est parti de là. (Aurélien finira alors sa saison au LOSC, NDLR).


Entre Douala et Lille, il y a quand même un monde, ça doit sacrément te changer ! Qu’est-ce qui te manque le plus lorsque tu es loin de ta ville natale ? Et à l’inverse, quelles choses apprécies-tu à Lille que tu ne retrouves pas ailleurs ?
Douala, c'est MA ville, celle où je suis né. J'y ai mes repères, j'y suis comme un poisson dans l'eau ! Ce qui me manque lorsque je n’y suis pas, c'est bien évidemment la famille et les amis d'enfance, mais aussi les klaxons des taxis, les poissons braisés… Et les plats de ma mère ! (rires) Lille, c'est mon deuxième chez-moi : La Grand Place, la chaleur des gens qui ont toujours un petit mot pour vous encourager, même en ce moment où leur équipe ne gagne pas trop… Comme je suis un grand amateur de films, j'apprécie me rendre au Kinépolis et à l'UGC. Les rues de Lille sont belles, j'y vais souvent m’y promener avec mon fils… J’ai d'ailleurs acheté une maison dans la région et, après ma carrière, je pense que je resterai toujours dans le coin. Parce que pour moi, tout a vraiment commencé ici, et je me sens à présent un peu nordiste dans un sens, j’ai vécu tant de choses ici !

Es-tu un joueur superstitieux ? As-tu des rituels d’avant-match ou un objet fétiche ?
Superstitieux, non. Mais j'ai mes rituels d'avant-match : je mets toujours la chaussure gauche avant la droite et, une fois sur le terrain, avant que le match ne commence, je fais ma prière et j’embrasse mes deux tatouages sur mes avant-bras, -qui sont les prénoms de mon fils et de ma mère- pour que tous deux m'aident pendant le match.

Le plus grand moment de solitude de ta carrière, lequel est-ce ? A l’inverse, si tu ne devais en retenir qu’un, quel est le plus bel instant que tu aies pu vivre en tant que footballeur ?
Jusqu'ici, j'ai eu deux grands moments de solitude dans ma carrière : ma glissade en Europa League qui nous coute un but (en Bulgarie face au Levski Sofia le 4 novembre 2010, NDLR), et mon but inscrit lors du match face à la Tunisie pendant la CAN 2010 avec l’équipe nationale du Cameroun… Parce qu’il était contre mon camp. Si je n’avais à retenir qu’un seul moment de joie, ce serait le jour où j'ai disputé mon tout premier match en ligue 1 avec le LOSC. C’était le 1er décembre 2007, face à l'OM.

Hormis ton club, si tu devais en choisir un à l’heure actuelle, dans quel club français aimerais-tu jouer et pourquoi ? Y a-t-il également un club étranger où tu te verrais évoluer par rapport à ton jeu ?
Je me vois mal mettre un autre maillot en France que celui du LOSC. Ça, c'est ce que je dis et pense,  mais le football a sa réalité qu'on ne maîtrise pas. On ne sait jamais ce qui peut se passer. Pour autant, je ne citerai pas un club en particulier et ainsi créer une polémique inutile ! Nous tous, en tant que joueurs, nous aimerions évoluer dans de gros clubs européens ! Aujourd'hui je suis à Lille, et j'espère un jour pouvoir évoluer à l’étranger, mais une fois encore je ne citerai pas de noms : ça n'est pas le moment, vu la situation que mon club traverse. J'ai du respect pour nos supporters et, avec tout ce qu'ils traversent en ce moment, il serait malvenu  de parler de mon potentiel avenir.

Y a-t-il un joueur croisé sur le terrain qui t’a particulièrement marqué ? Et si oui, pourquoi ?
Sans hésiter, je dirais Javier Zanetti (international argentin évoluant à l’Inter Milan, NDLR). Il est un exemple pour tout le monde, c’est un monument. A 39 ans, il est toujours là, à courir comme si c'était le premier match de sa carrière ! Un vrai monstre ! J’ai d'ailleurs son maillot dans ma collection personnelle.

Le plus grand joueur de tous les temps, selon toi, c’est qui ?
Pour moi, il y en a trois : Zidane, pour sa technique, la facilité qu'il avait de faire des gestes « venus d'ailleurs » ; Ronaldo- le brésilien-, le meilleur attaquant de tous les temps, selon moi. Malgré ses blessures, il était un vrai phénomène ! Enfin Messi, parce que ce mec n'a pas besoin d'entraînement pour être bon,  c’est inné. Messi, c'est LE football ! Un crack !


Y a-t-il un homme (ou une femme, ne soyons pas sexiste !), que tu admires pour l’ensemble de ses actions et de son œuvre, qui est une référence pour toi ?
Sans aucun doute ma mère, qui a élevé ses enfants avec force et courage. Je n'ai pas de honte à dire que je suis issu d'une famille pauvre. Malgré tout, ma mère a toujours tout fait pour qu'on soit à l'aise, on avait presque tout ce dont on avait besoin. C’est une femme brave et je tiens à lui dire que je l'aime, si jamais elle lit ses lignes.

Je sais que tu es un véritable amoureux du football et que tu n’as jamais pensé à exercer d’autre métier que ta passion. Mais quand ta carrière prendra fin, que feras-tu ? Quelle reconversion te souhaites-tu ?
Je pense à mon après-carrière, bien sûr ! Je vivrai certainement des investissements que j’ai réalisés, et si au sein du football, je peux servir, alors pourquoi pas? Néanmoins, je me verrais plutôt être scout (recruteur, NDLR) d'une équipe plutôt que d’en être son entraîneur.

Pour terminer, puisque les proverbes camerounais sont toujours très imagés et souvent cocasses, j’aimerais que tu choisisses celui qui définirait au mieux l’homme que tu es !
« La banane qui va mûrir, même à six pieds sous terre mûrit ». Cela veut dire : Croyez toujours en vous, en ce que vous faites, même dans les moments de galères où rien ne vous réussit !



LE VESTIAIRE DU LOSC VU PAR AURÉLIEN CHEDJOU

        Le plus gentil ?  « David Rozenhal »
        Le plus dragueur ? «Gianni Bruno, parce qu’il aime plaire et non pas parce qu’il drague à tous vas ! Je ne voudrais pas que ce soit mal interprété ! »
        Le plus discret ? « Adama Soumaoro »
        Le plus gourmand ? « Euh… je dirais moi ! (rires) »
        Le plus beau gosse ? « Marko Basa »
        Le plus en retard ?  « Barel Mouko »
        Le plus mal habillé ?  « il y en a un paquet, dont je fais partie ! (rires) »
        Le plus populaire ? « c'est mon éléphanteau, Salomon Kalou ! (rires) »



INTERVIEW PARUE DANS BUT! LILLE N° 6 (NOVEMBRE2012)






mardi 4 décembre 2012

INTERVIEW FOOT : FRANCK BERIA PASSÉ AU CRIBLE




 FRANCK BERIA PASSÉ AU CRIBLE



  Il est des gens qui, à mesure qu’ils gagnent en notoriété, perdent en humanité. Comme si, à chacun des pas en avant qu’ils accomplissaient sur leur parcours personnel, ces gens-là laissaient inexorablement derrière eux un peu plus des valeurs qui étaient sûrement les leurs quelques enjambées plus tôt. Et qui finissent par devenir de pâles succédanés de leur propre personne, bien trop occupés à paraître plutôt que d’être.
De ceux-là, en onze ans de journalisme, j’en ai connus beaucoup. Un peu trop, à mon goût.
Et puis il y a ceux qui n’oublient pas ; ni leur humanité, ni les valeurs qu’on leur a inculquées. Qui te parlent avec ferveur de leur passion, des étoiles plein les yeux, en mesurant la chance qu’ils ont de pouvoir la pratiquer. Qui savent intrinsèquement que leur amour du ballon rond ira toujours en grandissant, et qui trouvent toujours le temps de s’exprimer à son sujet. Franck Béria me semblait être de ceux-là. Et apparemment, je ne m’étais pas trompée…


LJ : Puisque tu es encore le mieux placé pour parler de toi-même, quels sont les adjectifs qui pourraient résumer Franck Béria le joueur, et ceux qui résumeraient l’homme ?
FB : C’est toujours difficile de parler de soi. Mais en essayant de jouer le jeu, je dirai pour le joueur : Polyvalent (ou multifonction), et pour l’homme : Moqueur mais respectueux.

Est-ce que justement le foot te fait devenir un autre homme ? Développe-t-il en toi des traits de caractère ou des capacités que tu n’as que sur un terrain et pas en dehors ?
 Depuis mon enfance, le football me permet de faire partie d’un collectif. Un milieu dans lequel je me sens bien puisque j’adore la convivialité des effets de groupe. D’un autre côté, j’ai grandi en cité avec la notion de plaisir sans forcément ressentir un besoin de gagner. Le contact avec mes adversaires et/ou coéquipiers m’a permis de révéler un esprit de compétitivité. L’exigence du niveau professionnel t’oblige toujours à faire de bons résultats. Cela a développé chez moi une culture de la gagne et la haine de la défaite.

Quelle est la chose que tu aimes le plus dans le football ?
J’affectionne particulièrement la rentrée des deux équipes sur le terrain… J’ai eu la chance de connaître l’émotion que procurent les grands matchs, lorsque le stade est en ébullition, que l’enjeu est à son paroxysme et que l’on ne peut même pas s’entendre sur la pelouse. Je suis un privilégié car on vit pour éprouver ce genre de chose.

Et celle que tu exècres par-dessus tout ? Est-ce qu’à la longue, cela serait capable de te faire abandonner ta passion si cela prenait le pas sur tout le reste ?
Paradoxalement, je déteste ceux qui trichent ou qui trompent le grand public en travaillant leur image à travers une médiatisation, parfois dirigée. Et malheureusement, dans le football comme partout, il y en a beaucoup ! Pour l’instant, cela n’a pas encore réussi à me dégouter du football.

Si tu n’avais pas eu la chance de vivre de ton football, quel métier aurais-tu aimé exercer ?
 Je ne tiens pas en place, je suis un impatient et intenable si je reste trop longtemps cloitré au même endroit. Si je n’étais pas footballeur, j’aurais de toute façon exercé un métier qui me permette de voyager et de voir beaucoup de monde, car j’aime m’adapter et voir différentes choses.

En dehors du foot, comment s’occupe Franck Béria ? As-tu d’autres passions ?
 J’ai repris les études depuis deux ans maintenant (Franck suit des études en Marketing des Organisations Sportives, NDLR). Et mes deux enfants, âgés respectivement de 3 et 5 ans, donnent déjà de quoi s’occuper. Je prends du plaisir à passer du temps en famille. Pour le reste, c’est soirée entre potes, sorties cinés, restaurants…

Tu es réputé pour ta grande polyvalence sur le terrain ; Mais toi, personnellement, à quel poste préfères-tu évoluer ?
 J’aime jouer latéral car ce poste me confère une participation plus directe sur les phases offensives. Malgré tout, je m’amuse également quand je joue dans l’axe  d’une défense car ce rôle nécessite une réflexion importante dans l’équilibre de l’équipe face au bloc adverse.

Tu as fait parti des Bleuets, notamment avec Rio Mavuba ; L’EDF pour laquelle tu as été préselectionné dernièrement, c’est toujours dans un coin de ta tête ? Puisqu’on a parlé de ta polyvalence, penses-tu qu’elle apporterait à cette Équipe de France ?
Officiellement, en tant que présélectionné, je peux effectivement être appelé un jour. Mais objectivement, je pense que le sélectionneur bâtit un groupe sur la durée dont je ne fais pas partie. A mon poste, il y a d’excellents joueurs. La particularité de mon profil est que je peux évoluer aussi bien à droite qu’à gauche ou encore dans l’axe. Cela offre une multitude de solution pour un entraîneur. Maintenant, au niveau international, c’est une autre histoire.

On stigmatise pas mal les footballeurs, on fait d’eux des portraits assez rédhibitoires d’hommes sans cervelle qui, lorsqu’ils ne courent pas derrière une baballe, courent après l’argent et les femmes.  Selon toi, pourquoi en est-on arrivé à schématiser un joueur de foot de la sorte ? Est-ce en partie justifié ?
On a tendance à schématiser les joueurs de foot parce qu’à un moment donné, certains ont véhiculé cette réputation rédhibitoire d’homme sans cervelle. Même si je ne pense pas que ce soit une majorité. En allant au fond des choses, on s’aperçoit que le football a énormément changé. Aujourd’hui les footballeurs doivent être prêts et réactifs dans leur interview, et ils n’y sont pas forcément préparés. Les médias font totalement partie du milieu. Et il y a une réelle évolution dans les techniques de communications, ce qui n’était pas forcément le cas auparavant.



Parlons un peu à présent de tes préférences en matière de football… Quel joueur est ton modèle ou ton idole de jeunesse ?
Lorsque j’étais plus jeune, Lilian Thuram a longtemps été un modèle d’exemplarité pour moi. L’épopée des Bleus en 98 a renforcé cet avis. Néanmoins, mon seul regret est de ne jamais avoir eu l’occasion de connaître l’homme.

Quand tu étais gamin, quelle(s) équipe(s) supportais-tu ?
Depuis les cités du Val d’Argenteuil où j’habitais, je supportais naturellement le PSG qui était le club de ma région. Je trouve d’ailleurs satisfaisant pour le football français que la capitale retrouve une dimension européenne sur la scène footballistique.

Quel est ton meilleur souvenir footballistique en tant que supporter, et celui en tant que joueur ?
Au-delà des titres gagnés,  c’est le maintien avec le FC Metz en 2004, qui correspond également à ma réelle éclosion chez les pros, qui représente mon meilleur souvenir en tant que joueur. En ce qui concerne mon meilleur souvenir supporter, c’est France 98, et la fiesta qu’on a pu faire dans les rues ! C’est surtout à ce moment-là que je me suis rendu compte de l’impact que peux avoir le football dans notre société.

Et les pires ?
En tant que joueur, mon pire souvenir reste notre descente en ligue 2 avec le FC Metz. De manière générale, ceux que j’ai en tant que supporter sont l’ensemble des tragédies dont nous avons pu être témoins lors de matchs de football : les décès de joueurs sur le terrain, la catastrophe de Furiani, les conséquences dramatiques des bagarres entre supporters…

A choisir parmi tous les championnats, lequel préfères-tu suivre et pourquoi ?
Parmi les championnats les plus réputés, je suis de plus en plus attiré par la Bundesliga. Les stades sont modernes avec une affluence constante. Et les allemands ont un football qui me séduit, il y a beaucoup de rythme, le jeu va vers l’avant, il y a gros niveau athlétique.

Le meilleur entraîneur selon toi, qu’il soit actuel ou passé, c’est qui ?
Le meilleur entraîneur est pour moi Jose Mourhino, pour l’ensemble de son œuvre.

La vidéo dans le foot, pour ou contre ? Tu es plutôt Michel Platini ou Sepp Blatter ?
Je suis pour la vidéo dans le football, même si je trouve certains arguments pertinents dans la bouche de ceux qui sont contre. Le niveau de compétition est de plus en plus élevé. La vitesse et l’intensité des matchs vont devoir être assumées par les corps arbitraux. Je pense que c’est inévitable sur la durée et j’espère simplement que cela ne va pas trop dénaturer ce sport.

Tu as l’air de préparer le terrain pour ton avenir, avec la formation en Marketing des Organisations Sportives que tu suis… Dans dix ans, tu te vois comment ?
 Dans dix ans, j’aurai peut-être un rôle différent dans le football. En revanche même si ça paraît comme étant une suite logique, passer mes diplômes d’entraîneur et de management ne me garantie pas obligatoirement un avenir dans le football. Entre temps, il est possible que je change de direction et que j’éprouve l’envie de faire autre chose. Néanmoins, j’avoue que j’aurais du mal à m’extirper du ballon rond. 


LE VESTIAIRE DU LOSC VU PAR FRANCK BERIA

Le plus chambreur : Je ne suis pas mauvais dans cet exercice…
Le plus calme : Idrissa Gueye
Le plus nerveux : Florent Balmont
Le plus sérieux : David Rozehnal
Le plus cultivé : Malheureusement, aucun joueur à part Grégory Dupont, notre préparateur physique.
Le plus Playboy : Marko Basa
Le plus marrant : Laurent Bonnart
Le plus timide : Adama Soumaoro (jeune joueur).


INTERVIEW PARUE DANS BUT! LILLE N° 5 (OCTOBRE 2012)