mardi 4 décembre 2012

INTERVIEW FOOT : FRANCK BERIA PASSÉ AU CRIBLE




 FRANCK BERIA PASSÉ AU CRIBLE



  Il est des gens qui, à mesure qu’ils gagnent en notoriété, perdent en humanité. Comme si, à chacun des pas en avant qu’ils accomplissaient sur leur parcours personnel, ces gens-là laissaient inexorablement derrière eux un peu plus des valeurs qui étaient sûrement les leurs quelques enjambées plus tôt. Et qui finissent par devenir de pâles succédanés de leur propre personne, bien trop occupés à paraître plutôt que d’être.
De ceux-là, en onze ans de journalisme, j’en ai connus beaucoup. Un peu trop, à mon goût.
Et puis il y a ceux qui n’oublient pas ; ni leur humanité, ni les valeurs qu’on leur a inculquées. Qui te parlent avec ferveur de leur passion, des étoiles plein les yeux, en mesurant la chance qu’ils ont de pouvoir la pratiquer. Qui savent intrinsèquement que leur amour du ballon rond ira toujours en grandissant, et qui trouvent toujours le temps de s’exprimer à son sujet. Franck Béria me semblait être de ceux-là. Et apparemment, je ne m’étais pas trompée…


LJ : Puisque tu es encore le mieux placé pour parler de toi-même, quels sont les adjectifs qui pourraient résumer Franck Béria le joueur, et ceux qui résumeraient l’homme ?
FB : C’est toujours difficile de parler de soi. Mais en essayant de jouer le jeu, je dirai pour le joueur : Polyvalent (ou multifonction), et pour l’homme : Moqueur mais respectueux.

Est-ce que justement le foot te fait devenir un autre homme ? Développe-t-il en toi des traits de caractère ou des capacités que tu n’as que sur un terrain et pas en dehors ?
 Depuis mon enfance, le football me permet de faire partie d’un collectif. Un milieu dans lequel je me sens bien puisque j’adore la convivialité des effets de groupe. D’un autre côté, j’ai grandi en cité avec la notion de plaisir sans forcément ressentir un besoin de gagner. Le contact avec mes adversaires et/ou coéquipiers m’a permis de révéler un esprit de compétitivité. L’exigence du niveau professionnel t’oblige toujours à faire de bons résultats. Cela a développé chez moi une culture de la gagne et la haine de la défaite.

Quelle est la chose que tu aimes le plus dans le football ?
J’affectionne particulièrement la rentrée des deux équipes sur le terrain… J’ai eu la chance de connaître l’émotion que procurent les grands matchs, lorsque le stade est en ébullition, que l’enjeu est à son paroxysme et que l’on ne peut même pas s’entendre sur la pelouse. Je suis un privilégié car on vit pour éprouver ce genre de chose.

Et celle que tu exècres par-dessus tout ? Est-ce qu’à la longue, cela serait capable de te faire abandonner ta passion si cela prenait le pas sur tout le reste ?
Paradoxalement, je déteste ceux qui trichent ou qui trompent le grand public en travaillant leur image à travers une médiatisation, parfois dirigée. Et malheureusement, dans le football comme partout, il y en a beaucoup ! Pour l’instant, cela n’a pas encore réussi à me dégouter du football.

Si tu n’avais pas eu la chance de vivre de ton football, quel métier aurais-tu aimé exercer ?
 Je ne tiens pas en place, je suis un impatient et intenable si je reste trop longtemps cloitré au même endroit. Si je n’étais pas footballeur, j’aurais de toute façon exercé un métier qui me permette de voyager et de voir beaucoup de monde, car j’aime m’adapter et voir différentes choses.

En dehors du foot, comment s’occupe Franck Béria ? As-tu d’autres passions ?
 J’ai repris les études depuis deux ans maintenant (Franck suit des études en Marketing des Organisations Sportives, NDLR). Et mes deux enfants, âgés respectivement de 3 et 5 ans, donnent déjà de quoi s’occuper. Je prends du plaisir à passer du temps en famille. Pour le reste, c’est soirée entre potes, sorties cinés, restaurants…

Tu es réputé pour ta grande polyvalence sur le terrain ; Mais toi, personnellement, à quel poste préfères-tu évoluer ?
 J’aime jouer latéral car ce poste me confère une participation plus directe sur les phases offensives. Malgré tout, je m’amuse également quand je joue dans l’axe  d’une défense car ce rôle nécessite une réflexion importante dans l’équilibre de l’équipe face au bloc adverse.

Tu as fait parti des Bleuets, notamment avec Rio Mavuba ; L’EDF pour laquelle tu as été préselectionné dernièrement, c’est toujours dans un coin de ta tête ? Puisqu’on a parlé de ta polyvalence, penses-tu qu’elle apporterait à cette Équipe de France ?
Officiellement, en tant que présélectionné, je peux effectivement être appelé un jour. Mais objectivement, je pense que le sélectionneur bâtit un groupe sur la durée dont je ne fais pas partie. A mon poste, il y a d’excellents joueurs. La particularité de mon profil est que je peux évoluer aussi bien à droite qu’à gauche ou encore dans l’axe. Cela offre une multitude de solution pour un entraîneur. Maintenant, au niveau international, c’est une autre histoire.

On stigmatise pas mal les footballeurs, on fait d’eux des portraits assez rédhibitoires d’hommes sans cervelle qui, lorsqu’ils ne courent pas derrière une baballe, courent après l’argent et les femmes.  Selon toi, pourquoi en est-on arrivé à schématiser un joueur de foot de la sorte ? Est-ce en partie justifié ?
On a tendance à schématiser les joueurs de foot parce qu’à un moment donné, certains ont véhiculé cette réputation rédhibitoire d’homme sans cervelle. Même si je ne pense pas que ce soit une majorité. En allant au fond des choses, on s’aperçoit que le football a énormément changé. Aujourd’hui les footballeurs doivent être prêts et réactifs dans leur interview, et ils n’y sont pas forcément préparés. Les médias font totalement partie du milieu. Et il y a une réelle évolution dans les techniques de communications, ce qui n’était pas forcément le cas auparavant.



Parlons un peu à présent de tes préférences en matière de football… Quel joueur est ton modèle ou ton idole de jeunesse ?
Lorsque j’étais plus jeune, Lilian Thuram a longtemps été un modèle d’exemplarité pour moi. L’épopée des Bleus en 98 a renforcé cet avis. Néanmoins, mon seul regret est de ne jamais avoir eu l’occasion de connaître l’homme.

Quand tu étais gamin, quelle(s) équipe(s) supportais-tu ?
Depuis les cités du Val d’Argenteuil où j’habitais, je supportais naturellement le PSG qui était le club de ma région. Je trouve d’ailleurs satisfaisant pour le football français que la capitale retrouve une dimension européenne sur la scène footballistique.

Quel est ton meilleur souvenir footballistique en tant que supporter, et celui en tant que joueur ?
Au-delà des titres gagnés,  c’est le maintien avec le FC Metz en 2004, qui correspond également à ma réelle éclosion chez les pros, qui représente mon meilleur souvenir en tant que joueur. En ce qui concerne mon meilleur souvenir supporter, c’est France 98, et la fiesta qu’on a pu faire dans les rues ! C’est surtout à ce moment-là que je me suis rendu compte de l’impact que peux avoir le football dans notre société.

Et les pires ?
En tant que joueur, mon pire souvenir reste notre descente en ligue 2 avec le FC Metz. De manière générale, ceux que j’ai en tant que supporter sont l’ensemble des tragédies dont nous avons pu être témoins lors de matchs de football : les décès de joueurs sur le terrain, la catastrophe de Furiani, les conséquences dramatiques des bagarres entre supporters…

A choisir parmi tous les championnats, lequel préfères-tu suivre et pourquoi ?
Parmi les championnats les plus réputés, je suis de plus en plus attiré par la Bundesliga. Les stades sont modernes avec une affluence constante. Et les allemands ont un football qui me séduit, il y a beaucoup de rythme, le jeu va vers l’avant, il y a gros niveau athlétique.

Le meilleur entraîneur selon toi, qu’il soit actuel ou passé, c’est qui ?
Le meilleur entraîneur est pour moi Jose Mourhino, pour l’ensemble de son œuvre.

La vidéo dans le foot, pour ou contre ? Tu es plutôt Michel Platini ou Sepp Blatter ?
Je suis pour la vidéo dans le football, même si je trouve certains arguments pertinents dans la bouche de ceux qui sont contre. Le niveau de compétition est de plus en plus élevé. La vitesse et l’intensité des matchs vont devoir être assumées par les corps arbitraux. Je pense que c’est inévitable sur la durée et j’espère simplement que cela ne va pas trop dénaturer ce sport.

Tu as l’air de préparer le terrain pour ton avenir, avec la formation en Marketing des Organisations Sportives que tu suis… Dans dix ans, tu te vois comment ?
 Dans dix ans, j’aurai peut-être un rôle différent dans le football. En revanche même si ça paraît comme étant une suite logique, passer mes diplômes d’entraîneur et de management ne me garantie pas obligatoirement un avenir dans le football. Entre temps, il est possible que je change de direction et que j’éprouve l’envie de faire autre chose. Néanmoins, j’avoue que j’aurais du mal à m’extirper du ballon rond. 


LE VESTIAIRE DU LOSC VU PAR FRANCK BERIA

Le plus chambreur : Je ne suis pas mauvais dans cet exercice…
Le plus calme : Idrissa Gueye
Le plus nerveux : Florent Balmont
Le plus sérieux : David Rozehnal
Le plus cultivé : Malheureusement, aucun joueur à part Grégory Dupont, notre préparateur physique.
Le plus Playboy : Marko Basa
Le plus marrant : Laurent Bonnart
Le plus timide : Adama Soumaoro (jeune joueur).


INTERVIEW PARUE DANS BUT! LILLE N° 5 (OCTOBRE 2012)