AURÉLIEN CHEDJOU PASSE AU CRIBLE
Chaque mois pour But ! Lille,
notre journaliste passe au crible un joueur du LOSC. Pour cette deuxième
édition, c’est au tour d’Aurélien
Chedjou de répondre à ses questions…
Aurélien Chedjou :
27 ans, international camerounais né à Douala et évoluant au poste de défenseur
au Lille OSC. Un gabarit imposant (1m84 pour 86 kgs), un rire communicatif et
tonitruant ; et un parcours somme toute atypique pour un footballeur
aujourd’hui passé professionnel qui attisait ma curiosité et sur lequel je
souhaitais revenir et m’entretenir, avec lui. Et c’est avec une grande
spontanéité et un naturel déconcertant qu’Aurélien a répondu à chacune de mes
interrogations. Rencontre avec ce cadre qui porte fièrement les couleurs du
LOSC depuis 5 ans, à la veille d’un Derby du Nord qui aura tenu toutes ses
promesses.
LJ : Ça patauge
un peu en ce moment au LOSC ; et si on ajoute à ça l’élimination du
Cameroun à la CAN et le climat de clivages et de polémiques qui tourne autour
des Lions Indomptables, comment se porte ton moral ? Quel est ton état d’esprit
du moment ?
AC : C'est vrai que tout n'est pas tout rose en ce moment au club… Mais
dans ces moments difficiles, il n'y a
qu'une seule solution : se réfugier dans le travail. La qualité, on l'a. Il
nous faut juste un peu de réussite et le reste suivra. Le moral ? Ca va,
un peu… Pourquoi seulement « qu’un peu »? Parce que ce n'est pas
évident de se lever chaque matin quand tout ne marche pas comme on veut.
Ton parcours dans le
football est assez atypique. Tu as
enchaîné les clubs en amateur, du Cameroun (Kadji
Sports Academy, NDLR) jusqu’en en France
(Pau FC, AJ Auxerre et FC Rouen, NDLR),
en passant par l’Espagne (Villareal CF,
NDLR), avant de poser tes bagages à long terme au LOSC, club qui t’a offert
la chance de passer professionnel et où ta venue, d’ailleurs, n’a tenu qu’à un
SMS de ta part à l’égard de Pascal Plancque (alors entraîneur de l’équipe réserve du LOSC, NDLR). J’aimerais que
tu reviennes sur cette histoire atypique et belle, et que tu portes un regard
sur ton parcours : Quel(s) sentiment(s) éprouves-tu lorsque tu vois le
chemin parcouru depuis la Kadji Sports Academy ?
Quand je
regarde mon parcours, jusqu'à présent, je me dis tout simplement que j'ai
énormément de chance… Dieu a voulu que j'arrive dans le monde professionnel du
football un peu plus tard que les autres, peut-être, mais cela fait partie des
épreuves de la vie ! Je dois aussi t’avouer que j'ai souvent douté…
Beaucoup, même. Et sans ce SMS envoyé au coach Plancque, - avec qui je suis
toujours en contact, d’ailleurs - tu ne m'aurais sûrement pas interviewé. Pour
te résumer l’histoire, je jouais alors à Rouen en CFA, ça n’allait pas fort, et
j’ai envoyé un message à Pascal Plancque (qui
avait déjà approché l’agent d’Aurélien une première fois lorsqu’il jouait à
Auxerre, NDLR) pour, soi-disant, prendre de ses nouvelles… Mais en réalité,
Je voulais « tâter le terrain », et savoir s'il pensait toujours à
moi. Et tout est parti de là. (Aurélien
finira alors sa saison au LOSC, NDLR).
Entre Douala et
Lille, il y a quand même un monde, ça doit sacrément te changer !
Qu’est-ce qui te manque le plus lorsque tu es loin de ta ville natale ? Et
à l’inverse, quelles choses apprécies-tu à Lille que tu ne retrouves pas
ailleurs ?
Douala, c'est MA ville, celle où je suis né. J'y ai mes repères, j'y suis
comme un poisson dans l'eau ! Ce qui me manque lorsque je n’y suis pas,
c'est bien évidemment la famille et les amis d'enfance, mais aussi les klaxons
des taxis, les poissons braisés… Et les plats de ma mère ! (rires) Lille,
c'est mon deuxième chez-moi : La Grand Place, la chaleur des gens qui ont toujours
un petit mot pour vous encourager, même en ce moment où leur équipe ne gagne
pas trop… Comme je suis un grand amateur de films, j'apprécie me rendre au Kinépolis
et à l'UGC. Les rues de Lille sont belles, j'y vais souvent m’y promener avec
mon fils… J’ai d'ailleurs acheté une maison dans la région et, après ma
carrière, je pense que je resterai toujours dans le coin. Parce que pour moi,
tout a vraiment commencé ici, et je me sens à présent un peu nordiste dans un
sens, j’ai vécu tant de choses ici !
Es-tu un joueur
superstitieux ? As-tu des rituels d’avant-match ou un objet fétiche ?
Superstitieux, non. Mais j'ai mes rituels d'avant-match : je mets
toujours la chaussure gauche avant la droite et, une fois sur le terrain, avant
que le match ne commence, je fais ma prière et j’embrasse mes deux tatouages sur
mes avant-bras, -qui sont les prénoms de mon fils et de ma mère- pour que tous
deux m'aident pendant le match.
Le plus grand moment
de solitude de ta carrière, lequel est-ce ? A l’inverse, si tu ne devais
en retenir qu’un, quel est le plus bel instant que tu aies pu vivre en tant que
footballeur ?
Jusqu'ici,
j'ai eu deux grands moments de solitude dans ma carrière : ma glissade en
Europa League qui nous coute un but (en
Bulgarie face au Levski Sofia le 4 novembre 2010, NDLR), et mon but inscrit
lors du match face à la Tunisie pendant la CAN 2010 avec l’équipe nationale du
Cameroun… Parce qu’il était contre mon camp. Si je n’avais à retenir qu’un seul
moment de joie, ce serait le jour où j'ai disputé mon tout premier match en
ligue 1 avec le LOSC. C’était le 1er décembre 2007, face à l'OM.
Hormis ton club, si
tu devais en choisir un à l’heure actuelle, dans quel club français aimerais-tu
jouer et pourquoi ? Y a-t-il également un club étranger où tu te verrais
évoluer par rapport à ton jeu ?
Je me vois mal
mettre un autre maillot en France que celui du LOSC. Ça, c'est ce que je dis et
pense, mais le football a sa réalité
qu'on ne maîtrise pas. On ne sait jamais ce qui peut se passer. Pour autant, je
ne citerai pas un club en particulier et ainsi créer une polémique
inutile ! Nous tous, en tant que joueurs, nous aimerions évoluer dans de
gros clubs européens ! Aujourd'hui je suis à Lille, et j'espère un jour
pouvoir évoluer à l’étranger, mais une fois encore je ne citerai pas de noms :
ça n'est pas le moment, vu la situation que mon club traverse. J'ai du respect
pour nos supporters et, avec tout ce qu'ils traversent en ce moment, il serait
malvenu de parler de mon potentiel
avenir.
Y a-t-il un joueur
croisé sur le terrain qui t’a particulièrement marqué ? Et si oui,
pourquoi ?
Sans hésiter, je dirais Javier Zanetti (international
argentin évoluant à l’Inter Milan, NDLR). Il est un exemple pour tout le
monde, c’est un monument. A 39 ans, il est toujours là, à courir comme si
c'était le premier match de sa carrière ! Un vrai monstre ! J’ai
d'ailleurs son maillot dans ma collection personnelle.
Le plus grand joueur
de tous les temps, selon toi, c’est qui ?
Pour moi, il y
en a trois : Zidane, pour sa technique, la facilité qu'il avait de faire
des gestes « venus d'ailleurs » ; Ronaldo- le brésilien-, le
meilleur attaquant de tous les temps, selon moi. Malgré ses blessures, il était
un vrai phénomène ! Enfin Messi, parce que ce mec n'a pas besoin d'entraînement
pour être bon, c’est inné. Messi, c'est
LE football ! Un crack !
Y a-t-il un homme (ou
une femme, ne soyons pas sexiste !), que tu admires pour l’ensemble de ses
actions et de son œuvre, qui est une référence pour toi ?
Sans aucun
doute ma mère, qui a élevé ses enfants avec force et courage. Je n'ai pas de honte
à dire que je suis issu d'une famille pauvre. Malgré tout, ma mère a toujours
tout fait pour qu'on soit à l'aise, on avait presque tout ce dont on avait
besoin. C’est une femme brave et je tiens à lui dire que je l'aime, si jamais
elle lit ses lignes.
Je sais que tu es un véritable
amoureux du football et que tu n’as jamais pensé à exercer d’autre métier que
ta passion. Mais quand ta carrière prendra fin, que feras-tu ? Quelle
reconversion te souhaites-tu ?
Je pense à mon
après-carrière, bien sûr ! Je vivrai certainement des investissements que
j’ai réalisés, et si au sein du football, je peux servir, alors pourquoi pas? Néanmoins,
je me verrais plutôt être scout (recruteur,
NDLR) d'une équipe plutôt que d’en être son entraîneur.
Pour terminer,
puisque les proverbes camerounais sont toujours très imagés et souvent cocasses,
j’aimerais que tu choisisses celui qui définirait au mieux l’homme que tu es !
« La banane qui va mûrir, même à six pieds sous terre mûrit ».
Cela veut dire : Croyez toujours en vous, en ce que vous faites, même dans
les moments de galères où rien ne vous réussit !
LE VESTIAIRE DU LOSC VU PAR AURÉLIEN
CHEDJOU
Le plus gentil ? « David Rozenhal »
Le plus dragueur ? «Gianni Bruno,
parce qu’il aime plaire et non pas parce qu’il drague à tous vas ! Je ne
voudrais pas que ce soit mal interprété ! »
Le plus discret ? « Adama Soumaoro »
Le plus gourmand ? « Euh… je dirais
moi ! (rires) »
Le plus beau gosse ? « Marko Basa »
Le plus en retard ? « Barel Mouko »
Le plus mal habillé ? « il y en a un paquet,
dont je fais partie ! (rires) »
Le plus populaire ? « c'est mon éléphanteau, Salomon Kalou !
(rires) »
INTERVIEW PARUE DANS BUT! LILLE N° 6 (NOVEMBRE2012)